Chacun le sait, la France est restée un pays profondément monarchiste, où les gens ont besoin d’un chef, même si celui-ci est sans cesse contesté… De là dérive une certaine schizophrénie à toujours vouloir une chose et son contraire : l’autorité, mais sans contrainte ! Malgré des évolutions, ces fondements de notre société restent bien présents et se retrouvent naturellement dans le monde du travail : il faut un chef, quelqu’un qui commande, mais dès que quelque chose ne plaît pas, on se rebelle et c’est la manifestation ou la grève.
Alors quand certaines entreprises osent mettre à bas la hiérarchie, quelle révolution ! Il s’agit alors de considérer les employés comme des adultes responsables et non plus comme de bons petits soldats. Les responsables de l’entreprise laissent alors leurs collaborateurs organiser leur travail à leur convenance en fonction de l’activité, en prenant garde de ne pas mettre en avant de « signes extérieurs de pouvoir ». Certains patrons ont en effet fait le pari de laisser beaucoup d’autonomie à leurs équipes pour libérer leur créativité. Dès lors, plus de parking réservé au patron, plus de bureau directorial, mais une homogénéisation des conditions de travail. Les salariés peuvent fixer leur propre emploi du temps, parfois sans manager, selon la nature du travail à effectuer. S’il le faut un employé leader est désigné par son équipe pour expliquer les tâches, à chacun ensuite d’imaginer la meilleure manière d’y parvenir.
Cela ne vaut que pour des micro entreprises pensez-vous ? Les biscuiteries Poult de Montauban ont arrêté l’usine pendant 2 jours en 2006 pour que les employés déterminent eux-mêmes l’organisation de leurs plannings et congés, en allégeant fortement la hiérarchie. Et depuis ? La productivité de l’usine a été multipliée par 2 en 2 ans ! La contrepartie de cette liberté se paye par la responsabilité de chacun et un engagement collectif qui définit quelques « règles du jeu » avec des comités d’expertise et un comité de pilotage. De même la fonderie Favi, en Picardie, a été découpée en mini-usines attachée à un client. Le leader de chaque mini-usine a une fonction d’assistance et non d’encadrement. Depuis, les ouvriers adaptent eux-mêmes leurs horaires à la charge de travail, il n’y a plus de pointeuse ni de placards fermés à clé, ni… de syndicats. Enfin, l’entreprise américaine Gore (applications à partir du téflon avec 10 000 employés dans le monde), mise sur le capital humain en laissant les employés s’auto-motiver et s’organiser eux-mêmes. Les sociétés de conseil et d’informatique sont sans doute les plus nombreuses à être libérées.
Ne pas avoir de supérieur hiérarchique ne signifie pas l’absence de règles, mais le recours à une autre compétence dans l’équipe lorsque cela s’impose, en respectant chacun. Imaginons que notre société prenne modèle sur ces entreprises libérées, quel bonheur !