Les orages violents, ce n’est pas nouveau. Les pluies torrentielles, non plus. Les inondations, non plus. Mais… quelle surprise lorsque des orages violents sont accompagnés de pluies torrentielles engendrant des inondations dans des lieux inattendus et avec une ampleur rarement constatée. Ainsi fin mai 2016, de violents orages s’abattaient sur une grande partie de la France, accompagnés de précipitations de quelques heures apportant autant d’eau qu’en plusieurs semaines en temps normal. Des inondations, parfois très locales, sont apparues en des lieux qui n’en avaient jamais connues. En Normandie ce fut le cas notamment sur le département de l’Eure, à Rouen, Buchy et le Pays de Bray.
Ainsi à Buchy il est tombé 85mm d’eau en une heure, provoquant une inondation du centre bourg de près d’un mètre. En Pays de Bray on a constaté plusieurs coulées de boues. Un peu plus tôt, fin 2015, les inondations qui avaient frappé le littoral méditerranéen avaient fait 20 morts ; il s’agissait là d’un épisode cévenol assez classique, mais qui prend de l’ampleur, au moins dans ses conséquences.
On manque encore de recul pour affirmer un lien avec les changements climatiques en cours, mais partout semble croître la fréquence et l’intensité de ces phénomènes, ce qui invite à retenir cette hypothèse. A cela s’ajoutent un certain nombre d’aménagements liés à l’agriculture (retournement des prairies, arasement des haies, comblement des mares…) et à l’urbanisation (étalement urbain, imperméabilisation des sols, grignotage des terres agricoles…) qui accélèrent les écoulements et le cumul des eaux en zones basses.
Comme Corneille le faisait dire à Don Diègue dans le Cid :
Ô rage ! Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie !
N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?
Soit en langage d’aujourd’hui : via l’Europe et la France, les contribuables sont invités à payer au 21ème siècle les réparations des dégâts causés par les dérives de l’agriculture et de l’urbanisme au 20ème siècle, subventionnés par… l’Europe et la France.
Réjouissons-nous toutefois que ces épisodes dramatiques suscitent des élans de solidarité exemplaires. De plus, et c’est le plus important, des réactions positives se mettent en place, il n’est jamais trop tard : la région Normandie lance un appel à projets relatifs aux investissements dits « non-productifs » liés à la réalisation d’objectifs agroenvironnementaux et climatiques (http://www.europe-haute-normandie.fr/actualites/feader/aap-4-4/) en ciblant en priorité les plantations et replantations du patrimoine arboré typique des territoires haut-normands sur terrains agricoles : haies de clos-masure, arbres têtards en vallée de Seine, haies vives en Pays de Bray, ripisylves, etc.