Selon l’ONU, entre 2005 et 2015, l’ensemble des catastrophes naturelles ont fait 700 000 morts, 1,4 million de victimes et 23 millions de déplacés. En 2015, justement, notre chronique Migrants-ci, migrants-là ! rappelait qu’il arrivait de l’ordre de 240 000 réfugiés en Europe par an, surtout en lien avec les guerres civiles africaines. Nous avons alors attiré l’attention sur la nécessité de gérer cette problématique en évolution dans la mesure où l’on pouvait déjà prévoir une amplification du phénomène avec les migrations climatiques à venir. Où en sommes-nous cinq ans plus tard ? En 2015, il y avait déjà 244 millions de migrants internationaux, soit 41 % de plus en 5 ans. Aujourd’hui, environ 250 millions de migrants dans le monde vivent hors de leur pays, dont 39 % contraints à cause de situations politiques ou économiques et 61 % à cause de catastrophes climatiques. Ce chiffre va encore augmenter du fait de la croissance de la population et surtout de l’accélération des dérèglements climatiques, si bien que l’on prévoit 1 milliard de migrants à la fin du siècle, si rien n’est fait…
L’Afrique de l’ouest est particulièrement concernée par les catastrophes climatiques depuis quelques années : sécheresses, désertification, déforestation, montée du niveau de la mer et inondations. Selon le GIEC, les températures pourraient augmenter de 3 à 6° dans le Sahel d’ici la fin du siècle. Ces migrations s’accompagnent de dégradations du milieu forestier, pour assurer l’autosuffisance alimentaire des migrants et prélever sur le milieu pour la construction de logements et les besoins énergétiques, y compris dans des parcs nationaux. Des aires protégées sont ainsi dégradées, amplifiant encore le phénomène. Ces concentrations de population génèrent des pollutions importantes des eaux et aussi des maladies infectieuses, telles que le SIDA en liaison, entre autres, avec des violences sexuelles…
Les migrations climatiques sont complexes et suscitent des controverses juridiques, politiques, économiques, sanitaires et humanitaires. Dès 1951… a été créé l’Organisation internationale pour les migrations. Les Nations Unies ont élaboré un Pacte mondial pour les migrations, adopté en décembre 2018. Mais ces documents sont peu contraignants… alors que le dérèglement climatique constitue l’un des principaux défis de santé publique du 21ème siècle.
Le dérèglement climatique va aggraver les inégalités en matière de santé. Il y a urgence à considérer la santé humaine dans une perspective de santé planétaire et à réinventer l’interaction entre les sociétés humaines et la nature. Pour nous Européens, cette situation impose un renforcement de nos institutions européennes pour peser sur les grands enjeux environnementaux et géopolitiques. Les replis nationalistes nous condamneraient à être des territoires de conquête sans que quiconque ne vienne à notre secours…