Claude Boulard vient de nous quitter. Il fut économiste, mais aussi philosophe. Diplômé de Sciences-Po Paris, il a enseigné l’économie dans le cadre de la coopération, puis a rejoint la Chambre de Commerce et d’Industrie de Rouen où il fut chargé de mettre en place le Comité d’Expansion du Grand Rouen qui deviendra plus tard l’ADEAR (Agence de Développement Économique de l’Agglomération Rouennaise). Nous avons été amenés à travailler ensemble, chargé de quelques prestations de conseil avec la structure qu’il dirigeait. J'aimerais rappeler deux faits qui prennent toute leur dimension au moment où l'actualité rouennaise est braquée sur Lubrizol et le "monde d'après" :
C'est au début des années 1990 que Claude Boulard a mis en place un groupe d'entreprises qui devait réfléchir sur des évolutions en matière de pollutions, de lien entreprises-urbanisme et en particulier sur la mise en place d'un groupe olfaction-environnement sur l'agglomération rouennaise. La suite fut la création d'un groupe d'olfacteurs chez Lubrizol, en parallèle à la mise en place d'un comité de riverains de l'usine de Rouen, expérience restée quasiment unique au plan national, avec un esprit de transparence au sein de cette entreprise afin d'échanger entre riverains et entreprise à propos de ses impacts environnementaux.
Par ailleurs, c'est à la suite de ces premières initiatives que Claude Boulard a lancé la réflexion, avec 206 partenaires pendant neuf mois, sur une Charte du grand Rouen Eurocité. Ce document de 1990 a marqué une étape importante de la vie rouennaise en faisant de l'environnement un atout de développement, pour une Eurocité de l’environnement ! Fait marquant, au point que le journal Le Monde du 3 mars 1991 relate l’évènement en soulignant quatre propositions majeures : « mettre en révision le schéma directeur Rouen-Elbeuf ; choisir l'excellence avec deux pôles de recherche : " moteur-combustion ", " chimie fine, pharmacie " ; faire de l'environnement un atout en utilisant l'important travail de recherche pour sa protection ; valoriser l'image de la Seine " grand lieu symbolique de Rouen " par le tourisme fluvial. »
Il peut être utile de rappeler ces faits, sans doute un peu oubliés, qui constituent une trace indéniable de l'action de Claude Boulard, qui soutint en plus une thèse de philosophie consacrée à Hegel, à la Sorbonne. Il fut membre titulaire de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Rouen à partir de 2003 et prononça son discours d’entrée sur le thème : « Argent et philosophie, vers une économie de la renaissance ».
Quelle clairvoyance que celle de Claude Boulard !