Les clos-masures constituent un symbole du pays de Caux (le triangle Rouen, Le Havre, Dieppe) et suscitent toujours un intérêt important, d’autant plus qu’ils sont de plus en plus menacés, surtout les plus modestes d’entre eux. Dans ces clos, ou cours-masures, l’habitation et les dépendances agricoles sont dispersées au sein d’une cour plantée de pommiers, fermée par un talus planté d'arbres, auquel s'oppose l'étendue des plaines agricoles, très ouvertes. Cette organisation du territoire rural et les formes paysagères et bâties associées ne se rencontrent nulle part ailleurs et l'origine reste approximative.
Ceci explique les nombreuses démarches, brochures et ouvrages consacrés à ces constructions paysagères. Pour ma part, c’est en 1978 que je publiais « Cours masures en Pays de Caux » (Museum de Rouen, 1978.- 85 p.), en accompagnement d’une exposition du Museum de Rouen sur le sujet, pour attirer l’attention sur la nécessité d’envisager des protections de ces paysages. Il y a 44 ans… Un peu plus tard, en 2008, on pouvait lire sur mon blog la chronique « Clos-masures, ou Caux c’est clos » annonçant la sortie d’un ouvrage du CAUE 76 et souhaitant que cet ouvrage puisse contribuer à ce que l’histoire du Caux… ne soit pas close. Il y a 14 ans… Cet ouvrage collectif « Clos-masures et paysage cauchois » (paysagiste, géographe, architecte, graphiste, archéologue et écologue - CAUE et Point de Vues, 2008.- 256 p.) rassemble les connaissances sur les clos-masures afin de sensibiliser aux menaces et aux scénarios d’évolution. Cet ouvrage est sans doute le plus complet et le plus transversal écrit à ce jour sur le sujet, car il aborde le clos-masure tant du point de vue historique que paysager, écologique que fonctionnel. L'évolution lente du paysage cauchois ne doit pas faire croire que désormais tout doit se stabiliser. Différentes évolutions sont en effet envisageables, mais toutes doivent prendre en compte les dynamiques actuelles ou futures.
Voilà bien longtemps que le souhait de sauvegarder ce patrimoine régional s’est exprimé, mais tout espoir n’est pas perdu. Des propriétaires de clos-masures se sont engagés pour la préservation de ces fermes cauchoises, avant qu’il ne soit trop tard et organisent des visites pour sensibiliser le public. Le Département de la Seine-Maritime s’est bien engagé dans cette démarche en sollicitant l’inscription des clos-masures au patrimoine mondial de l’Unesco, sachant que l’on en a recensé 900 sur 40 communes du Pays de Caux et qu’il pourrait bien en exister en réalité de l’ordre de 8 000 !
La protection du patrimoine va lentement, surtout en milieu rural. Ne désespérons pas, mais pour le petit patrimoine ordinaire du monde rural (petits bâtiments, granges, celliers…) il est déjà trop tard, on les voit tous s’effondrer dans nos campagnes.