- Une majorité de Français soutient les agriculteurs, mais… une majorité de Français achètent les produits alimentaires les moins chers, souvent importés…
- Les agriculteurs se sentent mal aimés, mais ils manifestent en déversant des tonnes de déchets sur la voie publique, arrosant de lisier des bâtiments administratifs, bloquant la circulation… tout cela aux frais des contribuables.
- Les faibles revenus des agriculteurs ont été au centre des débats, mais sans relativiser assez selon les types d’exploitation, petite, grande, voire géante, céréaliculture ou élevage, maraîchage, apiculture, etc.
- Les agriculteurs se plaignent de la « paperasserie » à laquelle ils sont confrontés. Il est vrai que tant l’administration française qu’européenne ne savent pas faire simple. Toutefois la France est le premier bénéficiaire de la PAC (Politique Agricole Commune) avec 9,5 milliards d’euros d’aides agricoles en 2022. Les aides directes de la PAC, attribuées à environ 400 000 bénéficiaires, représentent de l’ordre des 3/4 du revenu des agriculteurs… ce qui suppose tout de même quelques justificatifs.
- Les agriculteurs demandent moins de réglementation, certes tatillonne, mais celle-ci concerne pour une large part les questions environnementales. Les décisions du Premier Ministre pour calmer la révolte paysanne ont consisté surtout à reporter ou atténuer les contraintes liées à l’environnement… ce qui à terme va compliquer les activités agricoles, voire pour certaines les condamner !
Les agriculteurs sont de fait des praticiens de l’écologie. En effet ils cultivent de la biodiversité et sont largement dépendants de la diversité des écosystèmes et du climat. Ils le savent bien et quelquefois à leurs dépens. Ainsi, en ce qui concerne l’usage des pesticides, les agriculteurs ont plus de risque de développer certains cancers (sang, prostate, peau et certaines leucémies). Par ailleurs, en matière de dérèglement climatique, l’agriculture française contribue pour 18 % aux émissions de gaz à effet de serre et les agriculteurs vont en être les premières victimes avec tempêtes, sécheresses ou pluies diluviennes… De plus la mondialisation et l’intensification de l’agriculture sont à l’origine de nombreux dégâts environnementaux et sociétaux, en France et de nombreux pays. Il n’y a donc pas d’opposition entre agriculture et écologie, mais au contraire des complémentarités incontournables. Dès lors, voilà bien où se trouve la recherche de sens de la vie des agriculteurs. Inversement, atténuer les normes environnementales, « c’est le monde à l’envers » !
Ayant été fils d’agriculteur, je me souviens de la moisson faite avec une faucheuse lieuse tirée par deux chevaux, ou de la petite dizaine de vaches à traire à la main, dans les années 1950. Ainsi je mesure l‘évolution de la profession et ce qui reste à faire… Agriculteurs, consommateurs, électeurs, soyons solidaires ! Soyons cohérents afin de corriger chacun nos comportements contradictoires. Paysans, paysages et pays doivent constituer une union sacrée ; il en va de l’avenir de tous. L’agriculture de demain devra garantir la satisfaction des besoins alimentaires en circuits courts, sur une base régionale et, simultanément, permettre un bon fonctionnement des agro-écosystèmes, faute de quoi les agriculteurs se mettront en péril eux-mêmes. Ils l’ont bien compris : « c’est le monde à l’envers ». Alors agissons avec lucidité pour replacer l’agriculture au centre de notre avenir !