On l’a bien constaté pendant le petit épisode neigeux de janvier 2024, quelques centimètres de neige sur une partie de la France sont devenus le thème majeur de tous les médias et réseaux sociaux. Il est vrai que la neige sublime les paysages et qu’elle nous a manqué depuis quelques années. Cela surprend toutefois lorsque l’on se souvient d’hivers passés qui n’avaient rien à voir avec celui-ci. Et pourtant, oui, cet hiver 2024 a montré que le dérèglement du climat est devenu une réalité. Avec en Normandie, 15° à Noël, puis à nouveau 15° fin janvier, cet épisode neigeux et de gel est apparu incongru. La médiatisation de cet « évènement » traduit bien la prise de conscience qui s’opère et « l’éco-anxiété » qui va avec. Mais que se passe-t-il donc ? Mais où va-t-on ?
Il est avéré maintenant que notre planète a franchi des limites qui remettent en question l’avenir de l’humanité. Ce dérèglement constitue une alerte sérieuse, sachant qu’il n’est qu’un symptôme d’une atteinte globale de notre milieu de vie : une extinction de masse des espèces sauvages est en cours, du fait des activités humaines telles que l’agriculture et l’industrie ; par ailleurs, l’acidification des océans devient très préoccupante ; quant au dérèglement du climat lui-même, il présente des points de bascule imminents que sont la fonte des calottes glaciaires, la disparition des récifs coralliens, la fonte du pergélisol et la disparition des forets boréales et des mangroves. Rien que ça ! Ces modifications constituent une menace de grande ampleur pour l’humanité. Peut-on encore inverser la tendance ? Ce qui est sûr, c’est que l’on ne peut plus prélever davantage de ressources que la Terre ne peut en produire, nous sommes au bout de ce processus d’auto-destruction ! Il est donc aisé de prévoir, pour les prochaines décennies au plus, des pénuries diverses avec une crise économique et sociale conjointe. C’est pour cela que nous devons repenser notre civilisation, ce qui ne sera pas facile tant la métamorphose nécessaire va demander de mobilisation collective. L’économie est maintenant en déphasage total avec les connaissances scientifiques, sous l’effet des intérêts financiers et des conceptions maintenant obsolètes de la vie en commun. Changeons en profondeur l’économie mondiale, sachant que d’ores et déjà, on met en pratique, ici ou là, des expérimentations pour développer des économies locales et assurer un minimum vital à chacun. Redonnons du sens à la vie économique avec plus de solidarité et la conviction que nous avons une communauté de destin. Un point central de ces évolutions à faire est de parvenir à des productions pérennes qui tiennent compte des évolutions du climat et d’une proximité d’approvisionnement et de distribution sur un territoire maîtrisable. Dans le domaine de l’alimentation, l’agroécologie est un exemple de réponse à ces objectifs pour nourrir une population donnée de façon saine et nutritive en respectant les écosystèmes. De ce fait l’agriculture va se trouver de plus en plus au centre des défis qui nous attendent.
Ce ne sont pas les consommations et accumulations de toutes sortes qui font le bonheur, mais plutôt les retrouvailles avec la nature et nos congénères. La pandémie de Covid19 a montré que l’on pouvait se battre ensemble et revenir à des choses simples avec plus d’humanité. Nous y voilà, construisons le symbiocène ! Comme le disent les anciens dans les bistrots normands : « Où qu’on va ! Et pis tout s’bazar, s’rait ty pas d’not faute nous qu’avons ben profité d’tout, mais p’tet ben… un peu trop. »