C’est la crise : financière, puis inévitablement économique, ensuite sans doute sociale et enfin peut être politique. On peut s’inquiéter ou éviter de se faire peur, selon son tempérament, ce qui est sûr c’est l’impuissance face à la crise, pour en expliquer tant les causes réelles que les conséquences et sa durée.
Certes les dirigeants du monde se mobilisent pour éteindre l’incendie, faute de l’avoir empêché. Sans doute cette crise résulte-t-elle d’une dérive des procédures financières, mais n’est-elle pas aussi l’aboutissement logique d’une société-fric à laquelle nombre d’entre nous collaborent. On peut s’interroger sur les fondements éthiques du boursicotage, mais aussi sur les fondements éthiques des jeux d’argent, lotos, casinos et autres hippodromes auxquels la publicité nous invite en permanence… Il y a là comme une subordination du réel au virtuel. La confusion devient surréaliste quand la banque portugaise Best lance un nouveau placement jumelé avec un pari sur l’élection américaine : le bon pronostic rapportera 8 % au placement, contre seulement 2 % pour le mauvais !
On peut se demander aussi comment se fait-il que des dirigeants qui promettent depuis des années, voire des décennies, de « moraliser le capitalisme », supprimer les parachutes dorés ou revaloriser le travail, soient toujours en place. Comment se fait-il puisque c’est nous qui les élisons… Ainsi nous avons accepté, de fait, de débloquer 1 300 milliards € pour sauver les banques en Europe, soit 40 fois la somme nécessaire à nourrir pendant un an 1 milliard d’affamés des pays pauvres…
Au-delà des crises financière et économique, il s’agit d’une crise globale, culturelle, une crise de sens. Les conséquences de cette crise financière risquent d’être amplifiées par la crise de l’énergie (le prix du pétrole baisse artificiellement et pour une courte durée) et celle du climat (pendant la crise, le réchauffement continue). L’objectif politique actuel est de relancer la machine économique, alors même que cette crise financière aurait pu être l’occasion d’une pause puis d’une inflexion de la sacro-sainte croissance… Les experts du climat et de l’énergie ne cessent pourtant de rappeler que la recherche illimitée de croissance économique est incompatible avec la pérennité de notre environnement.
Il nous faut quitter la société-fric pour aller vers un éco-humanisme. L’impuissance politique actuelle est celle des dirigeants, mais elle est aussi la nôtre, à nous d’en tirer la leçon.