Depuis trois ou quatre décennies, dans les pays développés, et en France en particulier, tout a été fait pour favoriser la voiture au détriment des autres modes de déplacement. L’étalement urbain notamment (en 40 ans la distance domicile-travail en France est passée de 4 à 40 km) a rendu la voiture indispensable. L’industrie automobile est ainsi devenue un des piliers de l’économie, directement et par ses effets induits : fabrication et entretien des véhicules, infrastructures, carburants, etc. Les mythes de la croissance et de la consommation à tout va, ont eu raison… de la raison : l’industrie automobile n’a cessé de croître, sans se soucier de la saturation du parc (en France 82 % des ménages possèdent une voiture, 36 % deux et plus, 6 % trois et plus), de la diminution de la ressource en carburant (le peak oil est certainement atteint) et des conséquences sur l’environnement (en particulier sur l’effet de serre).
Les constructeurs ont foncé, sans se soucier de ces défis, si ce n’est en termes de communication commerciale. Mais la crise est là et le prix des carburants, provisoirement à la baisse, ne trompe personne ; chacun sait maintenant que la ressource est limitée. Faute d’anticipation de l’obstacle, les constructeurs automobiles sont… devant le mur. Ainsi aux Etats-Unis, les grandes gloires de « la bagnole » sont tout simplement menacées de disparition. Les constructeurs français envisagent un véhicule électrique pour dans… quelques années. Les constructeurs européens n’ont pas vraiment pris la mesure des enjeux, à la différence de leurs concurrents chinois et indiens.
Bien sûr que nous aurons encore besoin d’auto – mobiles pour nous déplacer, mais le système est à bout de course et il faut tout réinventer pour répondre aux enjeux économiques, sociaux et environnementaux, en somme au défi de la mobilité soutenable. Cela signifie, si l’on veut corriger les causes de cette crise, qu’il faut revoir totalement l’aménagement du territoire, inventer d’autres modes de propulsion (tout ne sera pas simple si l’on songe que le lithium nécessaire aux batteries des véhicules électriques est concentré dans les Andes et au Tibet et que son prix a été multiplié par 10 en 5 ans !), développer les transports collectifs et favoriser les circuits courts de distribution des marchandises.
La prise de conscience des aménageurs et des élus est réelle et les exemples de densification des villes avec des transports en commun performants sont légion (Carrefour a ainsi inventé les hypermarchés sans voiture en affrétant des bus pour le transport des consommateurs, mais cela se passe… en Chine). Reste à poursuivre dans cette voie, en accélérant le mouvement. Quant aux constructeurs automobiles, il n’est plus temps de les convaincre, il faut les contraindre d’autant plus si c’est l’Etat qui les renfloue…