Cela fait bien longtemps que l’eau est considérée comme un bien précieux. On sait maintenant que l’accès à l’eau potable est devenu un enjeu planétaire, particulièrement dans les pays en développement. En 1950, chaque terrien disposait de 16 800 m3 d’eau douce par an, en 2000 de 7 300 m3 et en 2025, ce ne sera plus que 4 800 m3. Déjà, aujourd’hui, près de 20 % de la population mondiale n’a pas accès à l’eau potable…
Même si l’acuité est moindre, la ressource en eau commence à poser problème aussi dans les pays en développement. Ainsi en France, 1/4 de l’eau est utilisée pour l’alimentation, 1/4 pour l’industrie et l’énergie et 1/2 pour l’agriculture (dont 50 % pour la culture du maïs irrigué !). Une concurrence entre les usages de l’eau apparaît de plus en plus souvent, par exemple dans les pays méditerranéens où le tourisme exerce une forte pression : en été le littoral de la Méditerranée accueille 250 millions de visiteurs en plus des 150 millions de résidents, avec des impacts forts. Les océans, ressources inépuisables, sont maintenant menacés d’asphyxie sur tous les littoraux du monde du fait de l’apport de matières organiques par les eaux usées et les intrants agricoles. Les modifications climatiques aggravent cette situation en modifiant le régime des pluies et créant des conditions de sécheresse extrême.
La gestion de l’eau est devenue, en quelques décennies, un défi à relever pour garantir la sécurité alimentaire, hydrique et énergétique de certaines régions, comme l’a rappelé le 13ème congrès mondial de l’eau tenu à Montpellier en septembre 2008. Des réponses doivent être apportées par les Etats et les collectivités locales. Ceci revient à poser la question de la répartition des rôles entre opérateurs privés et régies publiques de la gestion de l’eau, étant entendu que certaines missions ne peuvent pas être prises en charge par des opérateurs privés, faute de rentabilité économique (protection de la ressource, restauration des zones humides, etc.).
Il est urgent de considérer l’eau comme un bien essentiel, et l’accès à l’eau potable comme un droit fondamental, ce qui ne peut être un enjeu de marché. Les questions à résoudre sont celles de la « propriété » de l’eau et de sa gestion. La propriété des réserves devrait pouvoir être « mondialisée » (avec la création d’une agence mondiale de l’eau) afin d’éviter les guerres de l’eau entre Etats. La gestion devrait être assurée par des régies publiques à différents niveaux, en s’appuyant sur l’exemple français des Agences de l’Eau qui épousent les bassins hydrographiques plutôt que les délimitations administratives classiques et embrouillées. La RGPP (Réforme générale des politiques publiques) que met en place la France actuellement offre des opportunités de réflexion et de proposition à cet égard, à l’exemple de Paris et bien d’autres villes.