L’actualité bretonne de cet été a porté en grande partie sur la pollution des côtes par les algues vertes. La prolifération de la laitue de mer (Ulva armoricana) serait responsable de la mort d’un cheval et est fortement suspectée d’être à l’origine de problèmes sanitaires qui suscitent des débats animés. La décomposition de ces algues, amassées en grande quantité, dégage de l’hydrogène sulfuré, gaz très malodorant à faible concentration et très toxique à concentration élevée (et là on ne perçoit plus son odeur).
Ce phénomène est connu depuis une quarantaine d’années dans plusieurs régions du monde, notamment aux Etats-Unis, en Chine et en Europe du Nord, mais plus spécialement en Bretagne. Comme toujours en environnement, le phénomène ne doit pas être simplifié abusivement puisque cette prolifération résulte de la conjonction d’un faisceau de facteurs relatifs au sol, au climat, à l’hydrodynamique et aux activités humaines. Quoi qu’il en soit, cette prolifération résulte essentiellement d’un apport important de deux nutriments : l’azote est majoritaire, en provenance de l’agriculture, et le phosphore apporté par les rejets urbains d’eaux chargées de détergents.
Il faut rappeler à cet égard que la Bretagne compte sur son sol 3 millions d’humains, mais aussi 3 millions de bovins, 14 millions de cochons et 350 millions de volailles (chiffres du Conseil scientifique de l’environnement de Bretagne). Avec 5 % de la surface agricole utile française (SAU), la Bretagne accueille 30 % des élevages de veaux, 60 % de porcs et 45 % de volailles. Une telle concentration produit une charge en nitrates bien supérieure à ce que la terre et l’eau peuvent supporter.
La résolution du problème est tout aussi complexe que sa genèse. Dans la grande polémique qui s’est installée à la suite des incidents de cet été, au-delà du rappel du principe pollueur-payeur, de la condamnation de l’Etat français pour autorisation abusive de porcheries industrielles, des engagements du Grenelle de l’environnement non appliqués, du non respect par la France des directives européennes ou de… menaces de mort à l’encontre d’écologistes, on voit bien qu’il s’agit d’un problème plus global et plus collectif.
Certes l’agriculture (et non les seuls agriculteurs) a une grande responsabilité dans cette affaire en ne respectant pas toujours les engagements pris en matière d’environnement (on nous parle d’agriculture raisonnée…). Mais l’Etat, plus prompt à plier devant les lobbies qu’à respecter ses propres engagements, les collectivités locales qui n’ont toujours pas pris les mesures nécessaires en matière d’assainissement, les consommateurs qui veulent payer toujours moins chers les produits alimentaires, sont autant d’explications à la lenteur de la résolution de ce problème majeur.