Chacun se souvient de cette expression de gamin jouant dans la cour de récréation. A entendre les commentaires récurrents sur la crise, les « inquiétudes des marchés » ou la chute des bourses… on se demande parfois si l’on n’est pas revenu dans la cour de récréation, avec des conséquences plus redoutables toutefois. Depuis des décennies on nous dit qu’une économie moderne s’appuie sur les marchés et qu’elle comporte des risques mesurés. Pourtant la plus grande partie des petites entreprises, et les emplois qui vont avec, se passent bien de la Bourse. Par contre, ce qui enrichit les grandes entreprises n’est pas seulement la rémunération du travail, mais aussi la timbale boursière, sorte de Loto géant ou de grand casino pour personnes fortunées.
En résumé, les riches jouent à la Bourse pour faire de l’argent, ceux qui voudraient le devenir jouent au Loto, les autres travaillent… ou font la manche. Mais les banques, qui jouent elles aussi au grand casino, ne le font-elles pas avec notre argent ? Avec notre accord ou pas ? Force est de constater que face à l’avidité de certains, il y a eu un peu trop de désinvolture de notre part pour laisser faire cela, qui n’est ni juste, ni moral, mais… légal. Les banques françaises sont le plus souvent, à la fois, banques de dépôts et de marchés. Aux Etats-Unis, après la crise de 1929, les deux types de banques avaient été séparés afin de lever toute ambiguïté entre les dépôts des particuliers et les activités spéculatives. Ne faut-il pas à nouveau opérer cette clarification ?
Il s’agit bien là d’une interrogation sur le système économique que nous souhaitons, très libéral ou encadré. La situation actuelle consiste bien souvent à libérer ce qui touche aux marchés et aux profits et à socialiser ce qui concerne les pertes ou les risques, en les faisant assumer par les contribuables ou les générations futures.
Tout cela présuppose une autre conception du vivre ensemble et de la notion de partage. C’est ainsi que l’on voit les marchés orienter l’économie qui elle-même se régule avec des licenciements si besoin. On pourrait rêver d’un monde où l’économie s’appuierait d’abord sur les besoins et répartirait l’emploi en le partageant. Pour le moment, c’est l’exclusion qui prévaut : ceux qui ont un emploi le gardent et ceux qui n’en ont pas ont de plus en plus de difficultés à en trouver, les plus jeunes notamment. Comment en sortir, si ce n’est par une économie non marchande, à laquelle le courant écologiste peut contribuer, en privilégiant l’être plutôt que l’avoir. Selon l’Urssaf, le secteur associatif occupe aujourd’hui en France 12,5 % de l’emploi privé, soit 2 350 000 salariés. Voilà un beau sujet de méditation à propos d’une économie qui recherche la satisfaction de besoins plutôt que le profit, des entrepreneurs ou des actionnaires.