En Normandie, depuis 20 ans, le nombre de fermes a été divisé par 2 et en France c’est l’équivalent de la surface d’un département qui disparaît tous les 7 ans, sous l’emprise du bêton et du bitume pour des aménagements collectifs, mais aussi pour des constructions individuelles sur des terrains vendus par les agriculteurs… C’est dire combien l’accès à la terre peut être difficile pour des personnes voulant développer des activités agricoles tournées vers le marché local. Cet état de fait est d’autant plus regrettable que la France importe 35 % de ses produits bio, alors qu’ils pourraient être produits localement, et que par ailleurs, la mondialisation des marchés agricoles fragilise l’autonomie alimentaire des pays les moins développés. A ces perturbations s’ajoute une main mise de la propriété intellectuelle des semences, et donc une confiscation du marché, par les multinationales semencières. L’agriculture vit ainsi une révolution qui en fait de plus en plus une activité de caractère industriel, régie par des multinationales.
On peut aller encore plus loin dans cette voie, à l’exemple de Toshiba qui ouvre à Tokyo une « usine à légumes » où seront cultivées, hors sol et dans un liquide enrichi en nutriments, toutes sortes de légumes. Cette culture « bio » sera exempte de pesticides, stable toute l’année, saine et répondant aux souhaits des consommateurs nippons, surtout après la contamination des sols par l’accident nucléaire de Fukushima de 2011. Le bonheur !
Mais on peut aussi imaginer d’autres alternatives, comme le préconise Terre de liens, par exemple, créée en 2003 pour aider les personnes qui souhaitent devenir agriculteurs bio et de proximité. C’est ainsi qu’une centaine de fermes ont été achetées pour être louées ensuite et promouvoir des projets en faveur de la biodiversité et du respect du sol. D’autres initiatives du même ordre sont prises par le Confédération paysanne ou France Nature Environnement. Des réflexions sont en cours pour créer une plate-forme européenne pour attirer l’attention des politiques sur l’accès à la terre, souvent bloqué dans de nombreux pays européens.
Il s’agit bien de reconquérir des terres agricoles pour y implanter des projets alimentaires de proximité, en ayant recours notamment, à l’épargne citoyenne pour gérer la terre de production comme un patrimoine commun.