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  • : Le blog de Michel Lerond
  • : Libre opinion sur les questions d'actualité en environnement et développement soutenable
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  • Michel Lerond
  • Ecologue et essayiste. Dans notre pratique professionnelle, nous avons pu contribuer, notamment, à un meilleur accès à l’information sur l'environnement.

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24 décembre 2012 1 24 /12 /décembre /2012 09:37

       C’était une époque formidable. J’étais président, en situation de prendre toutes sortes de décisions et de les mettre en pratique. Je pouvais même changer d’avis et repartir dans une autre direction. 

Un jour, par exemple, je décidais de maintenir une raffinerie située en milieu urbain, alors qu’elle polluait le sol, l’air et l’eau depuis près d’un siècle. Mais je sauvais des emplois !

      Un autre jour, je disais qu’il fallait réduire l’usage des pesticides en agriculture, mais j’accordais des dérogations pour des épandages aériens. 

      Puis j’augmentais la taxe sur l’huile de palme de 300 % au motif qu’elle est néfaste à la santé et favorise la déforestation, mais cette taxe va rapporter beaucoup d’argent à l’Etat, puisqu’elle est très consommée, notamment dans les pâtes à tartiner.

      Puis je revenais discrètement sur les engagements pris pour la non-exploitation des gaz de schistes pour autoriser des forages expérimentaux, puisqu’un nouvel eldorado nous est annoncé, même basé sur des chiffres sans fondement.

     C’était amusant aussi d’annoncer qu’on allait favoriser le ferroutage, tout en mettant de plus en plus de camions sur les routes en les autorisant à passer de 40 à 44 tonnes.

     Je pouvais déclarer que j’allais faire de la France la nation de l’excellence environnementale et le prouver immédiatement en annonçant la mise en place d’une fiscalité écologique pour… 2016.

     Ou bien encore je prenais des mesures pour relancer la compétitivivitété… des entreprises en faisant fabriquer des voitures qui ne servent à rien, comme l’Alpine Renault.

     Autour de moi, les gens riaient, applaudissaient et s’agitaient de plus en plus, visiblement hilares du spectacle.

     Mais au fur et à mesure que le temps avançait, comme dans tout rêve, la situation devenait complexe, un peu cahotique, et je finis par me demander si j’étais vraiment président, et de quoi,  ou plutôt clown dans un sketch à la mode d’un humoriste cynique.

    J’ouvris un œil, aperçu un peu de jour et devinais, derrière les volets, la neige tombée pendant la nuit de Noël. Le rêve était terminé et je me demandais seulement si j’avais vraiment rêvé ou plutôt retracé une sorte de rétrospective de l’année… Un conte de Noël à l’envers, en somme.

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18 décembre 2012 2 18 /12 /décembre /2012 09:18

         Chaque année, le vice-président de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Rouen doit prononcer l’éloge de la vertu. C’était mon tour, le 15 décembre 2012. Si les vertus se divisent en vertus morales et intellectuelles, il est certain que je me sens davantage d’affinités avec celles qui incitent à rechercher des vérités dans un registre donné et qui ont leur siège dans la raison. La vertu se trouve ainsi à la confluence de l’intelligence, de la science et de la sagesse. L’écologie est-elle une vertu ? Certes non s’il s’agit de la discipline scientifique, mais peut être s’il s’agit de l’écologisme, courant de pensée venu d’Amérique dans les années 1960. Ah la vertu du langage approprié !

Pour être précis, il faudrait donc poser la question : l’écologisme est-il une vertu ? A en croire les discours ambiants, on serait tenté de répondre par l’affirmative. L’écocitoyen serait donc un être vertueux, surtout s’il trie correctement ses déchets ménagers, consomme des produits de proximité, se déplace à pied ou à bicyclette, etc. Mais comme une chose ne peut être pensée sans son contraire, il faut bien se résoudre à traiter de la vertu, fut-elle écologiste, et de son opposé le vice. Ainsi, le green washing, comme l’on dit maintenant en français, ne serait-il pas à l’opposé de la vertu ? Nous vivons une époque où l’on peut aisément se faire abuser et prendre un vice pour une vertu. Les protagonistes de la société de consommation ont été assez habiles pour légitimer des besoins qui n’en sont pas vraiment, en poussant à consommer toujours plus, et habillant de l’aura de la vertu ce qui ne pourrait bien être que des vices. C’est ainsi que la rhétorique publicitaire vante les vertus écologiques de toutes sortes de produits qui ne méritent pas forcément une telle promotion.

Ainsi, est-il vertueux d’utiliser des lampes basse consommation, alors qu’elles contiennent du mercure ? Est-il vertueux de consommer des produits « naturels » importés de pays où la sous-alimentation perdure ? Que d’exemples pourrions-nous donner, qui sont autant de situations à propos desquelles croît le doute, entre information et intoxication, entre besoins nouveaux et publicité commerciale ou entre vérité scientifique et charlatanisme…

Pour que l’écologisme soit une vertu, sans doute faut-il être bien informé et faire preuve de discernement, ce qui n’est guère aisé. Dans ce domaine, on pourrait enfin se référer à Jean-Jacques Rousseau dont on célèbre cette année le troisième centenaire de la naissance. Dans ses Rêveries du promeneur solitaire, notamment, il se montre précurseur en regardant la nature sauvage avec complaisance, en dehors de tout utilitarisme. Mais ce chantre de la vertu avait abandonné ses cinq enfants ! Personne n’est parfait, ni même tout à fait vertueux… (http://academie1744.rouen.free.fr/

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11 décembre 2012 2 11 /12 /décembre /2012 08:46

         Nous étions tout un groupe d’élus et de techniciens, partis de Rouen et du Havre pour visiter les nouveaux aménagements de Paris Tropiques. A notre arrivée en gare Saint-Lazare, Linda, chargée de communication à la mairie de Paris, nous invita à gagner les Champs Elysées par le métro. Descendus à la station de la place Clémenceau, nous fûmes tout de suite ébahis : la perspective depuis la Concorde jusqu’à l’Arc de Triomphe était devenue une coulée de verdure au sein de laquelle ne subsistaient plus que deux files de circulation automobile.

       C’est qu’en effet, après la canicule de 2003 qui avait fait 15 000 morts en France, les responsables de l’aménagement urbain avaient fini par admettre qu’il faudrait bien faire avec les modifications climatiques et plutôt les anticiper pour s’en prémunir. A Paris, il fut décidé vers 2015 de planter la voirie, au moins en partie, dès qu’elle dépassait 15 mètres de largeur. Le but était de modifier l’aménagement urbain en vue d’atténuer les effets des futures canicules qui allaient être de plus en plus fréquentes. La végétalisation des chaussées et des terrasses d’immeubles permettait d’espérer une baisse des températures de 3 à 5° en journée pendant une canicule. A cela s’ajoutaient de nombreux plans d’eau de petites surfaces qui contribuaient à la régulation thermique. Cette eau servait aussi à l’arrosage des plantations et provenait, bien sûr, du recyclage des eaux usées. Cette opération de longue haleine avait été dénommée Paris Tropiques, allusion au Paris Plage d’autrefois qui, d’une certaine façon, anticipait ce grand mouvement. Aujourd’hui, en 2028, Paris avait pris un tout autre visage et attirait encore plus de touristes que par le passé, tant cela paraissait révolutionnaire. Après la baisse de la circulation automobile de 25 % pendant la première décennie du siècle, celle- était maintenant réduite au minimum et la ville avait des airs de campagne en majesté !

       D’autres villes avaient les mêmes préoccupations, comme en Normandie. A Rouen, après que les quais aient été complètement réaménagés dans les années 2010-2015, il était question maintenant de déconstruire l’Ile Lacroix pour en faire un grand parc. Au Havre, la réflexion portait sur le verdissement d’une grande partie du port, après les tentatives réussies de transformation d’un bassin désaffecté en jardin aquatique.

       L’un des membres de notre groupe, bien que très satisfait de cette visite, temporisait notre enthousiasme : il disait avoir visité Singapour au début du siècle, c’était une cité verte dégoulinante de verdure, offrant des jardins botaniques, des serres et même une forêt vierge privée… en pleine ville. Il avait même pu visiter l’hôtel Marina Bay Sands qui disposait au sommet, à 200 mètres, d’une piscine bordée d’un bois de palmiers ! Que la nature soit parmi les Hommes.

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 08:24

             Il est des choses que l’on n’aime pas quantifier, parce qu’elles relèvent du qualitatif ou de l’affectif. C’est le cas de la biodiversité, déjà évoquée sur ce blog, mais aussi des maladies graves, tant leur impact psychologique peut être important. C’est ainsi qu’une étude récente, émanant de l’université d’Oxford révèle ce que coûtent les cancers. Il s’agit d’une mise en forme des données en provenance de nombreux organismes européens. L’étude annonce l’ampleur du « sinistre » avec un coût de 124 milliards d’euros par an pour l’Europe, soit de 32 € (Lituanie) à 165 € (Allemagne) par habitant. La France se situe dans la moyenne avec un coût de 91 € par an et par habitant. Ces coûts cumulent les frais de santé directs (hospitalisation et médicaments), les frais de suite et les pertes de productivité. Les cancers du sein et du poumon sont les plus coûteux avec respectivement 6 et 19 milliards d’euros par an pour l’Europe. 

          En France, comme dans bien d’autres pays, la lutte contre le cancer est une priorité de santé publique, ce qui est bien normal d’autant plus que les espoirs de guérison sont maintenant avérés. Mais en période de crise économique, la question d’une limite des dépenses pourrait se poser malgré tout. Il n’en est rien puisqu’en France, on compte près de 5 000 chercheurs sur ce thème, dont le principe de base est : « toute amélioration du service rendu au patient est jugée supportable au plan financier par la société ». La lutte contre le cancer représente un bel exemple de solidarité nationale qu’il n’est pas vain de rappeler en ces temps difficiles, mais ne faudrait-il pas aussi s’interroger sur les raisons de ces maladies et accentuer les efforts de prévention. 

         C’est dans cet esprit que l’ONG Green Cross Suisse vient de faire savoir qu’environ 125 millions de personnes dans le monde sont menacées par les 10 polluants les plus dangereux de la planète, avec des méfaits sanitaires équivalents à ceux des trois grandes infections mondiales que sont le sida, la tuberculose et la malaria. Comme trop souvent, dans bien des cas, on savait ! C’est le cas, par exemple, des émissions de micro-particules cancérogènes par les moteurs diesel, connues depuis une trentaine d’années et que l’on feint d’avoir découvert tout récemment. Il en résulte une impasse sur le plan industriel, compte-tenu de l’importance du parc automobile diesel, et des coûts importants supportés par… le système de santé, sans compter quelques « désagréments » pour les patients concernés. 

         Répétons le encore une fois : il y a un besoin impératif d’expertise et d’évaluation en amont. A minima, on fera des économies !

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27 novembre 2012 2 27 /11 /novembre /2012 08:23

        Ils avaient l’habitude de se retrouver le mercredi soir pour prendre ensemble une mousse ou un apéro. Parfois, ils restaient au bar, mais cette fois ils avaient préféré s’installer à une table en retrait. Voilà un moment qu’ils souhaitaient parler de la sûreté nucléaire. Non non, ce n’était pas le Café du Commerce, celui-là s’appelait L’Espoir. Avec un sens inné du marketing, le patron avait pris l’habitude de s’approcher doucement des clients dont les verres étaient vides et leur proposait, à mi voix : Je vous remets un peu d’Espoir ? 

        C’est Rémi qui entama la discussion en tant que défenseur du nucléaire : Alors Toi Antoine, tu t’es rallié aux écolos et leurs fantasmes qui foutent la trouille ?

        Antoine fut un peu vexé de cette entrée en matière, lui qui travaillait en environnement en cherchant toujours à cerner avec objectivité les questions posées. Il répondit : Je comprends que l’on puisse soutenir la filière nucléaire pour assurer un approvisionnement énergétique efficace, mais on ne peut pas sous-estimer les risques qui vont avec.

         Rémi : Mais quels risques ? A ce jour il n’est pas arrivé d’accident grave en France, que des incidents mineurs.

         Antoine : C’est vrai, mais il y a eu Three Miles Island, puis Tchernobyl et Fukushima plus récemment. Qui dit que nous sommes à l’abri de risques similaires ?

         Rémi : Mais non, tu sais bien que la technologie nucléaire française est tout ce qu’il y a de plus fiable. Et puis comment pourrait-on se passer du nucléaire ? On ne va pas construire des centrales au charbon avec les risques, bien plus importants, que cela comporte pour l’effet de serre. Et en termes d’emploi, tu y as pensé au gisement que représentent l’entretien des centrales existantes et la construction des EPR ?

         Antoine : On pourrait tout de même faire plus en ce qui concerne les énergies renouvelables, comme l’éolien, le photovoltaïque, la biomasse, la géothermie…

         Rémi coupa la parole : Parlons-en des éoliennes, avec la dégradation des paysages qu’elles engendrent. 

         Antoine : Tout cela se discute Rémi, mais revenons aux risques du nucléaire. En tant que chef d’entreprise tu as sans doute entendu parler du rapport tout récent de la Commission européenne sur l’état des réacteurs…

         Rémi : Que l’Europe s’occupe de ce qui la regarde !

         Antoine : Quand elle subventionne les entreprises, ça la regarde, mais pas quand elle s’intéresse à la sécurité des populations ? Alors je vais te dire l’essentiel des conclusions de ce rapport sur l’état des 145 réacteurs européens, dont 54 en France : Les équipements destinés aux interventions d’urgence ne sont pas protégés dans la moitié du parc ; dans 54 réacteurs les risques sismiques n’ont pas été pris en compte selon les normes récentes ; 24 réacteurs ne disposent pas de salle de commande de secours. En résumé, presque partout des améliorations à la sécurité doivent être apportées, et en particulier en France à Fessenheim, Tricastin, Cattenom et Chooz.

        Alors le patron du café s’approcha doucement d’eux et leur proposa, à mi voix : Alors Messieurs, je vous remets un peu d’Espoir ? 

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20 novembre 2012 2 20 /11 /novembre /2012 08:23

       Il est désagréable pour nombre de gens, dont les agriculteurs bien sûr, de rappeler sans cesse que l’agriculture est devenue trop souvent nuisible à l’environnement et la santé. C’est une triste réalité évoquée de façon récurrente à propos des pesticides, des OGM, de la dégradation des paysages et de la biodiversité. Mais est-ce une fatalité ou simplement une erreur d’orientation qui peut être corrigée ? Force est de constater que nous sommes face à un déni qui semble insurmontable. 

      Pourtant, si l’agriculture peut être source de menaces sur les habitats et les espèces, elle peut aussi contribuer à leur maintien, comme les prairies naturelles humides, les landes et garrigues, les prés salés, etc. Certains systèmes agricoles sont considérés comme étant de haute valeur environnementale (HVE) parce qu’ils sont à l’origine de ces avantages. Ce concept de HVE est d’ailleurs reconnu par l’Agence européenne de l’environnement, repris dans la PAC 2013 et en France dans la Stratégie nationale pour la biodiversité. Il s’agit de zones où l’agriculture est une forme majeure d’utilisation de l’espace et où elle est à l’origine d’une grande diversité d’espèces et d’habitats. Hélas, en 30 ans, ces zones ont considérablement reculé en surface. Aujourd’hui, les régions françaises les mieux représentées sont celles de polyculture-élevage comme la Corse et le Limousin (plus de 85 % de la surface agricole utile) ; les moins représentées étant l’Ile-de-France (0,5 %), le Nord-Picardie (3 %), et la Haute-Normandie (6 %). 

      Le soutien aux systèmes agricoles HVE est sans conteste une voie d’avenir, d’autant plus qu’une politique coordonnée avec Natura 2000  peut renforcer cette contribution forte à la restauration de la biodiversité. Cette démarche va de pair avec une révision des systèmes de production qui visent un faible niveau d’intrants (engrais et pesticides), la diversification des espèces cultivées et le maintien d’une biodiversité sauvage. Cela est possible, comme le démontrent deux agriculteurs de Bréauté (Seine-Maritime) en évoluant vers le « zéro intrant » afin de réduire les « impacts dévastateurs » et… les coûts ! (Paris-Normandie du 5-10-2012) Il s’agit, en fait, de réinscrire les processus culturaux dans le fonctionnement des écosystèmes, comme cela se pratiquait assez spontanément autrefois. Le principe est toujours le même : composer avec la nature, plutôt que s’y opposer, même si ce n’est pas toujours simple. Cela suppose également de revoir le relationnel sociologique et économique entre les acteurs des territoires : agriculteurs entre eux, agriculteurs et industriels et aussi agriculteurs et semenciers. Là encore, revenons aux fondamentaux, quel est l’objectif ? Faire du fric pour certains groupes ou nourrir la population de façon équitable et équilibrée ?

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13 novembre 2012 2 13 /11 /novembre /2012 08:12


         C’était le 8 septembre 2016, dans une rue piétonne de Rouen, Liky et Likia souhaitaient s’offrir « un bon resto » à l’occasion de l’anniversaire de leur première rencontre. Ils connaissaient déjà beaucoup de restaurants dans leur ville, mais n’étaient pas encore allés chez Insectus, qui venait d’ouvrir. L’entrée du restaurant était symbolique, avec une grande sauterelle en guise de portique, et la déco intérieure reprenait ce thème, avec force papillons, asticots, grillons, etc.

Le garçon de salle les accueillit et les mis tout de suite à l’aise en leur proposant un miel liquide ou un jus de vers de bambou en apéritif, puis leur proposa la carte. Celle-ci leur apparut effectivement des plus originales : verrines de pattes et ailes à l’échalote, quiche aux asticots, spaghettis aux grillons, riz au lait avec larves d’abeilles, vers de bambous, larves en poudre, etc.

Liky eut comme une hésitation à la lecture de la carte, tandis que Likia semblait curieuse de découvrir ces nouveaux mets. Elle s’inquiéta un peu de la moue de Liky : Ne fais pas cette tête mon amour, je comprends tes réticences, mais ce n’est que psychologique. Tout cela doit être très riche en protéines et tu sais que nous sommes des pionniers en pratiquant l’entomophagie. Nous contribuons ainsi à réduire les coûts environnementaux occasionnés par la production de viande. Les insectes demandent moins d’eau, moins de surface et émettent moins de gaz à effet de serre. C’est formidable, non ?

Liky voulait bien admettre ces arguments, mais ne se sentait plus guère d’appétit… Pour le convaincre tout à fait, Likia appela le garçon afin qu’il précise la recette des asticots aux grillons. C’est très simple, repondit-il, vous prenez environ 75 grammes d’asticots par personne et quelques grillons, vous faites bien revenir à la poêle avant de les mélanger à la crème, puis vous versez sur la pâte feuilletée. Vous pourriez faire la même chose avec des criquets ou des sauterelles. C’est délicieux et très nourrissant. Une vraie voie d’avenir !

Ils commandèrent donc ces asticots aux grillons, les dégustèrent et finalement furent conquis. Liky précisa même que l’alimentation, c’est vraiment culturel. On prend des habitudes étonnantes, comme par exemple, consommer avec délice des escargots, alors qu’il ne viendrait à l’esprit de personne de manger des limaces… Et ce fut la fête !

Aujourd’hui, en 2024, non seulement ce type de restaurant est devenu d’une grande banalité, mais on trouve aussi ces produits dans les supermarchés et chez certains producteurs locaux sur les marchés.

D’ailleurs cela était annoncé depuis longtemps, comme par exemple sur un excellent blog, dès 2010 : http://www.michel-lerond.com/article-ils-ont-faim-57833506.html

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6 novembre 2012 2 06 /11 /novembre /2012 08:37

         Les Français sont contestataires, révolutionnaires même parfois, mais ils sont aussi conservateurs et un rien monarchistes. En fait nous sommes surtout schizophrènes… Ainsi on peut être contre le nucléaire et pour les énergies renouvelables, mais on ne veut pas d’éoliennes qui « défigurent » le paysage. On est contre les camions en trop grand nombre sur les routes et pour le transfert sur le rail, mais on ne veut pas de nouvelles voies ferrées qui vont « couper » les villages. On est contre les déficits et pour réduire la dette, mais on ne veut diminuer aucune dépense ce qui pourrait « contrarier la croissance ». Etc.

Le pouvoir politique, nouvellement élu, a épousé cette même attitude, en commettant une erreur de communication aussi grossière qu’inefficace. Le discours, un rien schizophrène lui aussi, est : la crise est très grave, mais il n’y aura pas d’austérité… Il eut fallu être clairvoyant et dire la vérité : la crise est très grave parce que nous avons tous « tiré un peu trop sur la corde », il va falloir payer les dettes et pour cela entrer en austérité à laquelle tout le monde va devoir se plier. Le discours de vérité aurait consisté alors à annoncer des réductions drastiques des dépenses de fonctionnement de l’Etat (en commençant par le Parlement : réduction du nombre de parlementaires et de leurs avantages divers) et des collectivités territoriales en tranchant net dans le millefeuille administratif avec regroupements et redéfinition des compétences. Les entreprises auraient été contraintes de revoir leurs objectifs, non pas seulement pour « maintenir l’emploi », mais aussi pour élaborer des produits et services dont on a vraiment besoin et qui ne compromettent ni la santé ni l’environnement. Les citoyens auraient du être appelés à un effort exceptionnel avec augmentation des impôts et partage du travail, cela pouvant signifier baisse temporaire des horaires et donc des salaires pour employer des chômeurs. Il faut, bien sûr, que tout cela soit expliqué et argumenté, avec pédagogie et non démagogie.

Faute de cela, on tergiverse, on « parlemente », on multiplie les lois annonciatrices de réformes que l’on ne met pas en place ou que l’on réduit comme peau de chagrin année après année… La situation devient de plus en plus insupportable, avec de grandes disparités de niveaux de vie qui favorisent la montée des extrêmes.

Un coup de gueule ? Oui c’est un coup de gueule, parce que je voudrais que nous nous réveillions, faute de quoi nous pourrions connaître bientôt des réveils difficiles, avec gueule de bois prolongée… et je n’aimerais pas que mes enfants et petits enfants en soient les victimes.

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30 octobre 2012 2 30 /10 /octobre /2012 08:45

        C’était un beau matin de juillet, ciel bleu et soleil doux. En pleine lumière, Nathalie était très belle. Ses cheveux mi-longs, son sourire tendre, et « tout ce qu’il faut, là où il faut », comme disent les hommes un rien macho, la faisaient très séduisante. Sans concours, ni élection, Nathalie était considérée comme la plus belle femme du village. Elle avançait sur le trottoir de la rue centrale, tenant par la main son petit Valentin, blondinet de trois ans. C’était à croire que les grossesses la rendaient encore plus belle, son ventre lourd la cambrant un peu plus.

        Soudain, cette scène estivale fut troublée par un bruit assourdissant. Une voiture venant de la gauche freina sans succès et s’encastra dans le mur d’en face. Nathalie avait été happée par l’avant de la voiture, projetée sur le mur et retombée à son pied. Comme adossée, elle avait les jambes légèrement repliées, semblant vouloir encore protéger le contenu de son ventre, malgré une immense tâche de sang qui recouvrait le trottoir. Valentin avait été accroché par le pare-choc et propulsé sur le côté. Au passage sa main avait été arrachée et projetée en l’air. Cette petite main virevoltait interminablement, avant de retomber sur le store d’un magasin, comme une ponctuation désignant l’enseigne : Baby Fringues.

        La voiture était totalement enfoncée de l’avant et le conducteur, visiblement assez sonné. C’était le vieux Fernand, âgé d’environ quatre vingt dix ans. Il y a peu de temps, le maire du village avait rencontré son fils, au risque d’être accusé de délation, pour lui faire part de son étonnement à voir Fernand chaque jour au volant de sa voiture, bien qu’il soit reconnu comme atteint gravement de la maladie d’Alzheimer. Bruno avait soutenu son père en précisant qu’il n’allait que de chez lui à la boulangerie, tout juste un kilomètre, que c’était son seul plaisir de la journée, et qu’il ne pouvait rien arriver sur un aussi petit trajet qu’il connaissait si bien. Et donc il n’était pas question de lui enlever ce plaisir.

       Les gendarmes sont arrivés très vite sur les lieux de l’accident. L’un d’entre eux a reconnu Fernand et s’est dirigé vers lui. Alors Fernand, avec un large sourire l’interpelle : Bonjour mon commandant, quelle animation dans le pays ce matin !

      Nathalie a quitté les lieux sous le plus beau linceul du village. Valentin est parti dans une voiture rouge qui faisait pinpon, pinpon comme celle qui l’amusait tant dans sa chambre.

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23 octobre 2012 2 23 /10 /octobre /2012 08:47

Nombre de faits divers dans l’actualité récente ont fait écho à la recherche scientifique, qu’il s’agisse de médicaments, de produits phytosanitaires, d’OGM ou de divers produits de consommation courante. 

La recherche scientifique, par nature, comporte bien des incertitudes et les résultats peuvent être remis en cause ultérieurement. C’est d’ailleurs le fondement de la science. Mais les choses se compliquent un peu plus quand les recherches sont menées avec opacité. Comment alors, le citoyen peut-il se faire une opinion, comment le consommateur peut-il faire ses choix ? 

Au-delà des questions difficiles inhérentes à la recherche scientifique, les modes de financement pourraient bien être à l’origine de certaines controverses. C’est ainsi que telle étude « démontrant » l’impact des pesticides sur les abeilles est contestée, au motif de protocole ou de modèle mathématique insuffisants, par un chercheur… soutenu par un agrochimiste. N’est-on pas alors dans le conflit d’intérêts ? La récente polémique sur les OGM s’est appuyée sur une contestation portant sur l’insuffisance de rigueur du protocole d’étude, notamment par l’EFSA (Autorité Européenne de Sécurité des Aliments), qui elle-même est mise en cause lourdement pour conflits d’intérêts sur les OGM. 

La vraie question, semble-t-il, est celle de l’indépendance de la recherche. Autrefois elle était financée par des fonds publics, ce qui permettait une grande liberté d’approche et d’expression des résultats. Depuis une trentaine d’années, la recherche est le plus souvent financée par des entreprises qui attendent des résultats applicables, ce qui est logique, dans des délais raisonnables et sans trop s’apesantir sur les effets indésirables. Cette nouvelle donne débouche, inévitablement, sur des lobbyings puissants, et d’autant plus que les hommes politiques sont faibles…

A cela il faut ajouter les fraudes des chercheurs eux-mêmes, rares il faut l’espérer mais qui compliquent un peu plus le problème. La fraude est estimée à un article scientifique sur 10 000, mais est en augmentation du fait d’une logique économique qui exige un résultat opérationnel en un temps court, faute de quoi le laboratoire mandaté n’est plus financé... La médiatisation amplifie le phénomène en publiant des résultats annoncés, certes, mais pas obligatoirement validés en totalité. Ce fut le cas, à plusieurs reprises ces derniers temps, à propos de produits pharmaceutiques, pour lesquels la sensibilité du public est encore plus forte.

Pour limiter les impacts sur la santé et l’environnement de résultats « scientifiques », il faudra bien revenir à plus d’indépendance des chercheurs, des financements de la recherche et de présentation transparente des effets constatés.

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