« Est-ce que tu as obtenu de bonnes notes à l’école aujourd’hui », demande une maman à son enfant. « Est-ce que mon pays a obtenu une bonne note à l’agence aujourd’hui », demande le président de la république à son premier ministre. Autant la première interrogation est comprise et pertinente, autant la seconde est incongrue et insolente. C’est pourtant la réalité que nous vivons depuis de nombreux mois avec les notations financières.
Cette notation de la dette est l'appréciation, par une agence privée, du risque de solvabilité d’un État, d’une entreprise ou d’une opération. Elle consiste en l'attribution d'une note estimant les perspectives de remboursement envers les créanciers. C’est un critère clé dans l’estimation du risque qu’un investissement comporte, particulièrement dans le cadre de marchés financiers de plus en plus mondialisés. Les notations des instruments de financement à moyen ou long terme (d’un an à 10 ans ou plus) vont de AAA, qualité de crédit la meilleure, à D pour défaut de paiement. Meilleure est la note, moins l’émetteur de l’emprunt paiera d’intérêts. Dans une économie globalisée, la libre circulation des capitaux serait impossible sans notation financière qui puisse créer la confiance des investisseurs. C’est pourquoi, cette démarche, peu familière en Europe, s’est développée avec l’arrivée de l’euro.
Les trois plus grandes agences de notation sont américaines (Standard and Poors et Moody's) et franco-américaine (Fitch), créées entre 1900 et 1941, et se partagent 90 % du marché de la notation financière. La principale agence chinoise Dagong Global Credit Rating, était ignorée jusque récemment. Les agences notent ce qui est objectif, mais aussi « les capacités de s’en sortir », notion beaucoup plus subjective, ce qui génère quelques doutes sur la crédibilité réelle de ces « petites entreprises » de quelques dizaines de cadres. Ainsi, des agences, dont on ne sait que bien peu de choses, notent les états dans un contexte économique de plus en plus virtuel… La poignée d’analystes de ces agences tiennent ainsi dans leurs mains une partie du destin financier de nos institutions, et donc de nous-mêmes. Ces économistes font penser à une sorte de secte dominatrice, « maîtres du monde », avides d’argent, mais surtout de pouvoir. Alors, analyse, manipulation, gestion occulte d’intérêts inavoués ? Les suppositions vont bon train, d’autant plus que ces agences refusent tout audit et sont redoutées des politiques… Mais pourquoi donc n’avons-nous pas d’évaluations, certes importantes, faites par des instances publiques, reconnues, et en particulier au niveau européen ? Ce ne sera pas facile, d’autant que ceux qui ont accordé ces pouvoirs exorbitants aux agences sont… les organismes internationaux ! Le dernier G20 a « oublié » d’envisager cette question.