Après des « Grenelle » à tout va et des discours à n’en plus finir, la Stratégie Nationale de la Biodiversité (SNB) a été lancée le 19 mai dernier, sans vraiment convaincre… Le gouvernement se donne 10 ans pour enrayer la destruction des écosystèmes, mais avec une stratégie floue et des financements réduits. Tous les acteurs concernés se sont toutefois engagés sur une « déclaration d’engagement volontaire », à l’exception… des agriculteurs. S’il est vrai que depuis plusieurs décennies le monde industriel a pris à bras le corps les problèmes environnementaux, le Medef reste cependant prudent en s’impliquant « sans contrainte économique ».
Au niveau mondial pourtant, de nombreux pays réfléchissent pour prendre en compte le capital naturel dans la vie économique. En France, la nouvelle SNB va surtout reposer sur les bonnes volontés, plutôt que sur une politique ambitieuse. Une fois de plus c’est l’Union Européenne qui tente de redynamiser le processus : les 27 se donnent 10 ans pour mettre fin à la disparition des espèces et restaurer 15 % des écosystèmes dégradés. Cela pour la valeur intrinsèque de la biodiversité, mais aussi pour « sa contribution à la prospérité économique ». De plus, la biodiversité ne sera plus considérée comme un secteur autonome, mais devra être intégrée aux politiques de l’agriculture, la forêt et la pêche. Ainsi le document officiel prévoyait d’accroître les aides de la PAC conditionnées à des mesures de protection de la biodiversité, avec un objectif de 60 % des terres cultivées. Mais la France s’y est opposée en proposant le seuil de 40 %, et finalement tout chiffrage a été abandonné…
La problématique des pollutions azotées est éloquente à cet égard : l’ « Evaluation européenne pour l’azote » est une étude, rendue le 11 avril après 5 ans de travaux de nombreux chercheurs européens. Elle montre que le coût annuel des dommages causés par l’azote dans l’UE est le double des gains de production générés par ces épandages ! Certes, les pollutions azotées viennent de l’agriculture, mais aussi de l’industrie et de la circulation routière, avec des impacts sur l’eau, la biodiversité et la santé humaine. Les petites anecdotes éclairent parfois les grandes problématiques : au début des années 2000, je recevais un coup de fil discret d’un chercheur de l’Inra à Rennes. Sachant que je travaillais sur l’utilisation des lichens comme bio-indicateurs de qualité de l’air, il voulait savoir si je pourrais faire un travail sur les nitrates dans l’air. Cela n’était pas de ma compétence, mais la motivation de la démarche était intéressante : les mesures faites par l’Inra Rennes étaient très inquiétantes et les résultats avaient été interdits de publication… Comme disait quelqu’un : l’environnement, ça commence à bien faire !
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