Enfin, une partie du voile s’est levé sur le nucléaire, au moins sur ses coûts réels. En effet, la Cour des comptes a rendu son rapport sur les coûts du nucléaire en début d’année. En 2000 déjà, des experts mandatés par le gouvernement Jospin avaient estimé à près de 80 milliards d’euros le coût des 58 réacteurs français. Mais on a vite oublié… ces affaires secondaires. Le rapport de janvier 2012, lui, prend en compte aussi la maintenance, l’exploitation et la recherche publique, soit un total de 230 milliards d’euros par an. Cela vaut pour le présent, mais les magistrats de la Cour des comptes ont voulu aussi envisager les coûts à venir. C’est qu’en effet, l’énergie nucléaire génère des coûts sur le long terme, avec un calendrier et un chiffrage qui reposent sur de nombreuses hypothèses. Ainsi, le démantèlement serait estimé à 32 milliards d’euros, sans pouvoir valider ce montant, faute d’expérience réelle. Tout cela pris en compte, le résultat final est… un peu approximatif, établissant le coût du mégawatheure nucléaire entre 33,4 et 49,5 €. Haute technologie ne va pas de pair avec haute précision !
Comment payer tout cela, sachant que le parc nucléaire vieillit (58 tranches de 25 ans en moyenne) et que le prolongement de leur durée de vie ne pourra guère aller au-delà de 40 ans. 22 de ces réacteurs auront 40 ans en 2022, il faudra les démanteler… et les remplacer, et par quoi ? Que l’on prolonge la durée de vie des centrales, ou qu’on les remplace par des EPR (il en faudrait 11 !), les coûts prohibitifs vont faire doubler le prix de l’électricité.
Le nucléaire est donc cher, et de plus en plus, mais qu’en est-il du bilan économique du nucléaire et des autres énergies, notamment « renouvelables » ?
On peut apprécier ces constats, ou les déplorer, selon que l’on est partisan du nucléaire ou pas. Mais ce qui est extraordinaire, c’est que pour la première fois, depuis les années 1950, une expertise aussi détaillée est conduite pour enfin se poser la question des coûts. On croit rêver… Tout cela sans compter les risques liés à la prolongation de la durée de vie des centrales ou à leur démantèlement. Alors, risques réels ou fantasmes ? Coûts prohibitifs ou supportables ? En fait, personne ne sait vraiment répondre à cette question, en dehors des invectives entre partisans et adversaires.
Bien sûr, « la France ne court aucun risque du type Fukushima », mais si d’aventure un accident survenait, cela aurait un coût très élevé. Qui indemniserait les victimes ? Rien n’est vraiment prévu, si ce n’est que l’assurance repose sur l’Etat et non sur l’exploitant…
Le nucléaire, énergie de l’avenir, peut être. Encore faudrait-il avoir des idées claires sur les coûts, les risques et les comparatifs avec d’autres énergies, dès maintenant. Le nucléaire, une bombe je vous dis !