Des directives de la Commission Européenne visent à protéger les réserves d’eau de surface et les nappes phréatiques. Celle de 1975 définit la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire. Celle de 1991 concerne la protection des eaux contre la pollution par les nitrates. Elles exigent que les Etats membres désignent des zones vulnérables dans lesquelles la concentration en nitrates dans l’eau dépasse 50 mg/l. Elle demande aussi que des programmes d’action soient mis en œuvre dans ces zones avec un suivi effectué tous les trois ans. Depuis longtemps, l’Organisation mondiale de la santé préconisait de ne pas dépasser 25 mg/l.
Les nitrates proviennent des élevages intensifs et des produits phytosanitaires utilisés en agriculture, ils polluent durablement les eaux de surface et souterraines et sont en grande partie à l’origine des algues vertes envahissant les côtes bretonnes (http://www.michel-lerond.com/article-c-est-de-l-algue-ou-du-cochon--37852138.html). C’est en… 1969 qu’est créée l’Association pour la protection du saumon en Bretagne, devenue depuis Eau et rivières de Bretagne. Voilà donc plus de 40 ans que les défenseurs de l’environnement essaient de surpasser les hésitations de l’Etat. En Bretagne, le taux moyen de nitrates est de 35 mg/l, mais atteint parfois 80 mg/l. En Haute-Normandie, c’est la totalité de la région qui a été classée en « zone vulnérable » en 2003. Lorsque les concentrations en nitrates sont excessives dans l’eau potable, il y a un risque de maladies graves, notamment chez les jeunes enfants, lié à la transformation de nitrate en nitrite, ce qui réduit la capacité du sang à transporter l’oxygène.
En 2001, la France est montrée du doigt pour avoir enfreint la directive, avec 37 points dépassant la norme. Après de multiples rappels à l’ordre, en 2009, faute de réponses convaincantes, la France est mise en demeure par Bruxelles. En 2012, la France est poursuivie par la Commission pour non application de la directive, d’autant plus que des textes des ministères de l’agriculture et de l’écologie, de début 2012, assouplissent les conditions d’épandage ! La décision de la Cour de Justice Européenne est tombée en plein Salon de l’agriculture, au printemps dernier. Le montant des amendes est très élevé et peut être de l’ordre de 120 000 € par jour, ce qui viendra s’ajouter aux coûts des traitements de potabilisation de l’eau, soit entre 1 et 1,5 milliard d’euros par an, aux frais du contribuable bien sûr.
Avec tous ces intrans, c’est à se demander si un jour il restera un peu de place pour mettre de l’eau dans les nitrates !