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  • : Le blog de Michel Lerond
  • : Libre opinion sur les questions d'actualité en environnement et développement soutenable
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  • Michel Lerond
  • Ecologue et essayiste. Dans notre pratique professionnelle, nous avons pu contribuer, notamment, à un meilleur accès à l’information sur l'environnement.

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19 juillet 2023 3 19 /07 /juillet /2023 09:01

     Nous avons vécu un printemps 2023 très original ! Certes le printemps est le plus souvent un moment agréable par la douceur du climat. Mais cette fois… c’était bien au-delà de ce que l’on pouvait attendre. Un peu partout sur la planète, le thermomètre s’est affolé, au risque de nous en faire souffrir. Les températures ont ainsi atteint des niveaux records avec 39,4° en Chine, 49,8° en Iran, 47,4° au Mexique, mais aussi 40° en Sibérie, à plusieurs reprises en juin ! En France dans l’Hérault aussi on a atteint les 40°.

     Records battus partout, avec des niveaux jamais enregistrés à cette date et des conséquences déjà visibles sur les habitants : coups de chaleur mortels et sécheresses intenses qui perturbent les cultures. Ces épisodes ont eu pour effet des feux de forêts parfois gigantesques comme au Canada (10 millions d’hectares brûlés !). Par ailleurs la fonte accélérée de la glace des pôles arctique et antarctique génère des modifications climatiques, donc un cercle vicieux. Le début de l’été a confirmé cette évolution, les 4 et 5 juillet 2023 la température moyenne de l’atmosphère de toute la planète a atteint 17,18°C, soit un record absolu, avec une amplification des conséquences sur tous les continents. C’est ainsi que l’on a pu constater des températures de 50° en Espagne, 52° en Chine et 53° dans la Vallée de la Mort aux Etats-Unis...

     Dans le même temps, les océans ont souffert en silence avec des températures qui ont dépassé, eux aussi, tous les records. Ces évènements historiques ont des répercussions importantes sur la biodiversité de la planète. L’Atlantique Nord a connu ce printemps une canicule marine sans précédent, avec des températures annonciatrices de pertes de biodiversité et de perturbations climatiques terrestres violentes. Les chercheurs en océanographie s’attendent à ce que les herbiers marins, importants puits de carbone, soient soumis à un stress qui va augmenter leur besoin en oxygène pour survivre, ce qui est impossible. De plus, les océans sont des vecteurs puissants de phénomènes climatiques extrêmes qui font craindre encore davantage d’inondations et de tempêtes.

     L’Europe est particulièrement concernée dans la mesure où, selon l’ONU, le vieux continent s’est réchauffé de 2,3°C depuis la période pré-industrielle, contre 1,2°C pour l’ensemble de la planète ! C’est depuis la fin du XXème siècle que le dérèglement climatique est devenu une réalité perceptible. Les années 2014-2019 ont été les plus chaudes jamais observées dans l’histoire depuis… 120 000 ans, c’est à dire le Paléolithique. A ce stade un petit retour en arrière s’impose, de seulement 50 ans. L’année 1972 a été marquée par un point de bascule dans la prise de conscience de notre avenir écologique. En effet c’est cette année-là que fut publié le fameux rapport Meadows « Les limites de la croissance » soulevant la question des limites physiques de notre planète quant à l’accroissement des consommations en tous genres. En juin de la même année se tenait le premier « Sommet de la Terre » à Stockholm alarmant sur le fait que « Nous n’avons qu’une Terre » comme l’a proclamé l’ONU. Dès lors tout est connu, les risques liés aux pesticides et la déforestation pour la biodiversité, le réchauffement climatique et ses conséquences redoutables, mais tout cela paraît lointain et incertain. Néanmoins, l’idée que notre Terre pourrait devenir un jour inhabitable est bien présente, au moins dans certains esprits. Et voilà que, cette année là encore, en 1972, le vice-président de la Commission européenne, Sicco Mansholt réagit au rapport Meadows en proposant une profonde réforme de notre économie qui passerait « par un net recul du bien-être matériel par habitant et par une limitation de la libre utilisation des biens. » Il propose aussi de passer du PIB (Produit intérieur brut) à l’Utilité Nationale Brute. Il y a 50 ans ! Et depuis ?

     Avec un prix des énergies qui reste bas, malgré les apparences, on constate une surconsommation qui n’en finit pas. De nouveaux besoins incessants annulent les efforts de sobriété, comme les climatiseurs, les écrans géants, les publicités lumineuses, l’internet, sans oublier les vacances aux antipodes ou les croisières… De ce fait la transition énergétique ressassée par les politiques semble bien vouée à l’échec. Les réformes à faire de toute urgence doivent bien prendre en compte une meilleure répartition des richesses afin que les plus démunis ne soient pas les seuls à être contraints à des efforts. Pour aller dans ce sens, l’ONU a voté le 18 avril 2023 une résolution exceptionnelle sur l’Economie Sociale et Solidaire (ESS). Avec l’adoption de ce texte, la communauté internationale affirme que l’ESS est une source de transformation de nos modes de production et de consommation, c’est un acte puissant pour faire rayonner les valeurs de solidarité et d’humanisme. Mais pour ce qui nous concerne, en juin 2023, le Haut Conseil pour le climat juge que la France a été dépassée par les évènements climatiques extrêmes qui l’ont frappée en 2022 et appelle à accélérer l’action tant pour la réduction des émissions de GES que les adaptations au dérèglement climatique. Tout cela ne sera pas possible sans une révolution économique d’ampleur qui fait actuellement défaut.

     Nous disposons maintenant des savoir-faire et des technologies nécessaires pour surmonter les problèmes liés au dérèglement du climat et l’érosion de la biodiversité, mais ce qui manque c’est une volonté politique forte pour « renverser la table » afin de repartir sur une économie nouvelle, avec un large soutien des citoyens.

     Nous y sommes, le mur est là devant nous ! Alors que faisons-nous ? On succombe ou on bifurque ? Comme il a été dit : « A demain… si vous le voulez bien ». Il n’y aura un avenir… que si chacun y contribue.

 

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commentaires

L
je lis toujours avec intérêt votre blog et le problème est que ce mur est invisible pour beaucoup.<br /> Je voulais aussi apporter une précision sur l'enregistrement des records de température par un article du Monde de ce vendredi qui me semble intéressant<br /> https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/07/19/comment-sont-etablis-les-records-de-temperature_6182612_4355770.html?xtor=EPR-32280629-[a-la-une]-20230721-[zone_edito_2_titre_1]&M_BT=47625281585270<br /> <br /> bon été
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M
Merci Lucile de votre intérêt. Effectivement, je souhaiterais que mon blog soit vu davantage. Il est toutefois accessible librement et en abonnement, ainsi que sur Facebook et Twitter. Quant à la référence du Monde, j'en avais eu connaissance et il est vrai que ces précisions sont importantes. Merci encore.
C
"Il n’y aura un avenir… que si chacun y contribue."<br /> <br /> et bien non Michel... Il y aura un avenir et chacun y contribue. Ce vocabulaire neutre est ambigu. Ceux qui s'obstinent à grappiller à la marge de quoi nourrir leur "taux de marge" sans envisager de changer quoique soit dans leurs pratiques ou mode de vie, contribuent à accélérer la détérioration de cet avenir que te connaissant tu souhaiterais comme tous ceux qui alertent pas depuis 1972 car tu ne retiens de Mansholt qu'une bribe... en fait ce "libéral" entendait avant tout s'appuyer sur ce début de prise de conscience pour programmer une formidable régression sociale. <br /> <br /> Notre planète aura un avenir et chacun y contribue, les humains auront-ils un avenir ? C'est moins certain ! Il y a tellement parmi nous de ces "passagers clandestins" chers à la sociologie libérale de Boudon et Cie.<br /> <br /> Pour contribuer à la conscientisation ... "Il n’y aura un avenir vivable, enviable, supportable… que si chacun contribue à embrayer les efforts dans ce sens !" A plus. Claude
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P
Merci pour ce recalage de pendule ! Ca fait du bien d'avoir les dates (relatives) en tête...
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M
Merci Philippe de ton commentaire. Eh oui, comme tu le sais, pour se faire entendre il faut souvent rabâcher...